Colloque international / International conference
(please scroll down for English version)
Jeudi 1 et vendredi 2 juin 2017
Université de Bordeaux Montaigne
Comité organisateur
Mathilde Arrivé (EMMA, Université Paul-Valéry Montpellier 3)
Nicolas Labarre (CLIMAS, Université Bordeaux Montaigne)
Héléna Lamouliatte-Schmitt (CLIMAS, Université de Bordeaux)
Richard Phelan (LERMA, Université Aix-Marseille)
En 1999, le livre désormais classique de Jay David Bolter et David Grusin, Remediation: Understanding New Media (MIT Press, 1999) introduisait la notion de « remediation » pour décrire la manière dont les nouveaux médias incorporent et redéployent (« refashion » and « repurpose ») des contenus visuels initialement conçus dans des médiums dits traditionnels — photographie, peinture, film, télévision — dont les contenus sont eux-mêmes issus de remédiations successives. Pour les deux auteurs, cette volonté d’offrir l’illusion du réel, tout en jouant avec l’opacité intrinsèque des médiums, se place au cœur de l’histoire de l’art occidental, au cœur même de la circulation des objets culturels :
What is a medium? We offer this simple definition: a medium is that which remediates. It is that which appropriates the techniques, forms, and social significance of other media and attempts to rival or refashion them in the name of the real. A medium in our culture can never operate in isolation, because it must enter into relationships of respect and rivalry with other media. (Bolter and Grusin 65)
Si la notion de remediation a permis de repenser l’héritage essentialiste greenbergien de la « pureté » et de « l’autonomie » des médiums artistiques, ou le déterminisme technologique d’un Marshall McLuhan, elle sature désormais nombre de débats sur l’image. Mais l’ouvrage de Bolter et Grusin a également fait l’objet de critiques, eu égard, en particulier, au flou entourant la notion même de remediation, au caractère dépolitisé ou décontextualisé de leur analyse, à une vision téléologique des médiums ou encore à leur approche trop strictement techniciste et trop exclusivement centrée sur les nouvelles technologies numériques.
Aussi, près de 20 ans après la publication du livre de Bolter et Grusin, nous proposons de relancer les réflexions autour de la notion de remediation afin d’en clarifier les contours, d’en préciser les enjeux, voire de les redéfinir au-delà de la tension hypermediacy / immediacy qu’identifiaient les deux auteurs. Alors que la notion a largement échappé à l’ouvrage qui l’a produite, il s’agira d’en éprouver la productivité, la pertinence ainsi que les éventuelles limites à l’épreuve de différents corpus issus notamment de l’aire culturelle anglophone, pour ouvrir de nouvelles pistes de recherche.
On pourra ainsi se demander :
1. En termes définitionnels
- Quelle est la généalogie intellectuelle de la notion de remediation ?
- Quelle est la spécificité de la notion de remediation par rapport aux notions connexes, telles qu’adaptation, intermédialité, transmédialité, interartialité, intersémioticité, médiamorphose etc. ?
- Comment se déploie la double acception du terme « remédier », au sens de remplacer et d’améliorer ?
- Le lien dialogique entre immédiateté et hypermédialité, cette oscillation entre transparence et opacité de la médiation, continue-t-elle à refléter les approches théoriques esthétiques actuelles de la représentation ?
2. En termes disciplinaires et théoriques
- Quel espace théorique la remédiation peut-elle occuper ou produire ? Comment la positionner dans le paysage disciplinaire existant, en particulier en Europe ?
- Comment la remédiation renouvelle-t-elle les grands récits artistiques — celui de l’originalité, de la nouveauté — et certaines catégories fondatrices du discours sur l’image — celles de l’imitation, de la copie, de l’authenticité et de la contrefaçon ?
- Comment la notion de remediation consolide, complique, redéfinit ou invalide les étiquettes de médiums dits « neufs » et « anciens », « émergents » et « résiduels » ?
- La remédiation implique-t-elle nécessairement de penser les médiums plutôt que les images ?
3. En termes plus empiriques
- Quelles sont les modalités de déplacement, d’incorporation et de redéploiement d’un médium à l’autre, d’un médium dans l’autre ?
- Un médium peut-il être à la fois « remédié » et « remédiant » ?
- En marge d’une téléologie de la nouveauté et d’une approche unidirectionnelle (« from old to new media »), que font les mediums dits traditionnels aux médiums dits nouveaux, et vice versa ?
4. D’un point de vue anthropologique
- De quelle nature sont les commerces de la remédiation avec la mémoire culturelle ?
- Quelle est la place des phénomènes de remediation dans les « guerres de l’image » (Latour) ?
- Comment les phénomènes de remediation s’articulent-ils aux comportements visuels, tels qu’iconoclasme, iconophilie et iconophagie ?
- De quelles transformations ou opérations culturelles les processus de remediation sont-ils la trace, l’indice, le produit ou l’architecte, l’embrayeur ou la catalyse ? Quels sont les enjeux symboliques, culturels et politiques de ces transformations visuelles et médiatiques ?
- Quel est le rôle des institutions, des communautés de regardeurs dans les processus de remediation ? Quels en sont les lieux ou les acteurs, les modalités de production/réception ?
- Quelle attitude ou posture de réception la remédiation induit-elle ?
- Comment théoriser les approches immersives, basées sur le principe de réalité virtuelle, qui voudraient effacer la marque du média, et intégrer cette notion de « désir » du spectateur ?
Ce colloque entend poursuivre les travaux inaugurés autour de l’idée de circulation et de dialogue visuels en s’inscrivant dans le sillage des rencontres organisées à Montpellier (« L’intericonicité » en mai 2013 et 2014), à Bordeaux (« L’image indicible » en avril 2014, « L’image déplacée » en juin 2015), et à Aix (séminaire « J’ouïs sens de l’image »).
Sans se limiter aux nouvelles imageries numériques, mais sans néanmoins les exclure, les communications pourront porter sur tous les arts visuels et médiums sans exclusive : peinture, sculpture, photographie, bande dessinée, film, série, vidéo, imprimés, jeu vidéo, etc.
Les communications, d’une vingtaine de minutes, pourront être en français ou en anglais. Elles pourront porter sur l’aire anglophone dans son ensemble.
Les propositions de communication (300 mots environ), accompagnées d'une brève présentation biographique de l'auteur, sont à envoyer le 15 juin 2016 au plus tard aux membres du comité organisateur :
WHAT DO PICTURES DO?
“REMEDIATING IMAGES/ L’IMAGE REMÉDIATISÉE”
June 1 and 2, 2017
Université de Bordeaux Montaigne
Organizing Committee
Mathilde Arrivé (EMMA, Université Paul-Valéry Montpellier 3)
Nicolas Labarre (CLIMAS, Université Bordeaux Montaigne)
Héléna Lamouliatte-Schmitt (CLIMAS, Université de Bordeaux)
Richard Phelan (LERMA, Université Aix-Marseille)
The term “remediation” was first introduced in 1999 by Jay David Bolter and David Grusin in their now classic Remediation: Understanding New Media (MIT Press). They adopted the term in order to describe the way new media refashion visual content initially created within “traditional” media such as photography, painting, film and television, a content which often itself turned out to have been a product of successive repurposings or “remediations”. According to the authors, central to Western art history and to the very circulation of cultural objects is the project of offering a rival illusion of the real by playing against the differential opacity intrinsic to media:
What is a medium? We offer this simple definition: a medium is that which remediates. It is that which appropriates the techniques, forms, and social significance of other media and attempts to rival or refashion them in the name of the real. A medium in our culture can never operate in isolation, because it must enter into relationships of respect and rivalry with other media. (Bolter and Grusin 65)
Enabling a rethinking of the essentialist Greenbergian legacy of the medium’s “purity” and “autonomy” or the technological determinism of Marshall McLuhan, the concept of remediation today pervades a number of debates on the image. Bolter and Grusin’s work has also, however, been the object of some criticism — notably with respect to the imprecise definition of the notion itself, to the lack of contextualisation and to the depoliticized nature of the authors’ analysis, to their teleological vision of media or to an approach which is excessively technical or exclusively concentrated on new digital media.
Hence this proposal, some 20 years after the book’s publication, to relaunch the debate on remediation so as to clarify the contours of the notion, to examine in detail all that is at stake, and perhaps to redefine the issue in terms other than the tension identified by the authors between hypermediacy and immediacy. Already largely autonomous from the book which produced it, the notion can thus be sounded anew for productivity, pertinence and potential limits through confrontation with various corpi, in particular those from the English-speaking world. The aim is to open new avenues of research by inviting questioning in the categories below and along the following lines:
1. Definition of the concept
- What is the intellectual genealogy of the notion of remediation?
- What is the specificity of the notion of remediation with respect to related notions such as adaptation, intermediality, transmediality, interartiality (as defined by Walter Moser), intersemioticity, and mediamorphosis, etc.?
- In the term “remediation”, what is the effect of the semantic interplay of “remedy” which means both to replace and to resolve or improve?
- Is the dialogical link between immediacy and hypermediacy, which charts the oscillation between the transparency and the opacity inherent to mediation, still operative in current approaches to the esthetic theory of representation?
2. Theory and disciplinary fields
- What theoretical space can remediation occupy or create? What is its place within the field of existing disciplines (in France in particular)?
- How does remediation renew art’s master narratives of originality and novelty and certain basic categories of image discourse such as those of imitation, authenticity, the copy and the counterfeit?
- How does the notion of remediation consolidate, complicate, redefine or invalidate the labels “new” and “old” (“emerging” and “residual”) media?
- Does remediation necessarily imply that we think in terms of media rather than in terms of images?
3. Empirical observation
- How does one medium redeploy itself within another? What are the modalities of transfer and embodiment?
- Can a medium be both remediated and remediating?
- When the teleology of novelty is set aside with its one-way approach from “old” to “new” media, what can be observed about the way traditional media operate on “new” media, about what each does to the other?
4. Anthropological issues
- What sort of transactions takes place between remediation and cultural memory?
- What role do phenomena of remediation play in “image wars” (Latour)?
- How are phenomena of remediation linked to visual behaviors such as iconoclasm, iconophilia and iconophagia?
- Of what transformations and cultural operations are procedures of remediation the trace, the sign, the product, the architect, the shifter or the catalyst? What is at stake symbolically, culturally and politically in such visual and media changes?
- What is the role of institutions and of communities of viewers in the processes of remediation? Who are the participants of remediation, what are its loci and modalities of production and reception?
- In terms of reception, what attitude or posture does remediation induce?
- How can we theorize the immersive approaches that are based on the idea of virtual reality seeking to reduce awareness of the medium and foreground the viewer’s desire?
This symposium will pursue the research on visual dialogues and the circulation of pictures inaugurated in Montpellier (during the day sessions devoted to intericonicity in May 2013 and 2014), in Bordeaux (“L’image indicible” in April 2014, “L’image déplacée” in June 2015), and in the visual arts seminar at Aix-en-Provence.
Without being restricted to new digital imagery but without excluding the latter, papers may deal with any form of visual art or medium: painting, sculpture, photography, comic strips and graphic novels, film, television series, prints, video, video games, etc.
Papers should be 20 minutes in duration and can be in French or English. They may cover any area of the English-speaking world.
Submissions (of about 300 words) should be sent by June 15, 2016 to the members of the organizing committee:
Please enclose a brief bio-bibliographical note.
Bibliographie indicative
BAETENS, Jan. “Remediation or Premeditation ?”, riPOSTe, http://www.altx.com/ebr/riposte/rip9/rip9bae.htm
BAETENS, Jan. “Looking at McLuhan – ‘Remediation’, Iconophobia and Denial of the Body in The Medium is the Massage”, January 2003, http://www.imageandnarrative.be/inarchive/uncanny/janbaetens3.htm
BARTHOLEYNS, Gil, Alain Dierkens et Thomas Golsenne (dir.). La Performance des images. Bruxelles : Éd. de l’Université de Bruxelles, 2009. Print.
BELTING, Hans. Pour une anthropologie des images. Paris : Gallimard, 2004. Print.
BOLTER, Jay David, et Richard GRUSIN. Remediation : Understanding New Media, Cambridge (Mass.), London : The MIT Press, 2000. Print
BRUNET, François (dir.) et alii. L'Amérique des images. Histoire et culture visuelle des États-Unis. Ouvrage collectif.Paris : Hazan et Université Paris 7 Diderot, 2013. Print.
DEBRAY, Régis. Manifestes médiologiques. Gallimard, 1994. Print.
ECO, Umberto, Marc Augé, Georges Didi-Huberman. L’Expérience des images. Paris : INA, 2011. Print.
GUNTHERT, André. « L’image conversationnelle. Les nouveaux usages de la photographie numérique ». Études photographiques 31 (printemps 2014) : 55-71. Print.
HUTCHEON, Linda. A Theory of Adaptation. New York, London : Routledge, 2012. Print.
LATOUR, Bruno. Sur le culte moderne des dieux faitiches, suivi de Iconoclash. Paris : La Découverte, 2009. Print.
LÓPEZ-VARELA, Asunción et Ananta CHARAN Sukla (eds.), The Ekphrastic Turn : Inter-art Dialogues, Champaign, Illinois : Common Ground Publishing LLC, 2016 [livre électronique].
MACLUHAN, Marshall. Pour comprendre les medias (Understanding Media, 1964). Paris : Seuil, collection « Points essais », 1977.
MARESCA, Sylvain. « La Ronde des avatars ». La vie sociale des images. http://culturevisuelle.org/viesociale/4030. 12 novembre 2013. Web. 9 février 2015.
MITCHELL, W.J.T. Picture Theory. Essays on Verbal and Visual Representation. Chicago and London : Chicago UP, 1994. Print.
MITCHELL, W.J.T. What Do Pictures Want? The Lives and Loves of Images. Chicago : Chicago UP, 2005.