Colloque international "Après la terreur / After Terror : 2. Reconstructions / Rebuilding".

afterterror2Appel à communications / Call for Papers :

8-9-10 novembre 2012

CLIMAS - Université Michel de Montaigne - Bordeaux 3.

 

« Il n'y a pas d'avenir pour le désastre », écrivait Blanchot en ouverture de L'Écriture du désastre en 1980. Et pourtant, depuis, la question de « l'après » ne cesse de se poser, au rythme des catastrophes naturelles, technologiques, individuelles et collectives qui ébranlent la planète, de Tchernobyl à Fukushima, du Darfour à Haïti, en passant par Lhassa et Sarajevo. De séisme en famine, de rapt en massacre, la question se pose au politique, au thérapeute, à l'écrivain, à l'artiste : où et comment trouver les moyens de reconstruire ?

Cette question de la reconstruction, ce sont toujours les survivants qui la posent, sur les ruines où il faut revivre, et souvent à partir d'un pays d'accueil où ils cherchent des moyens de se relever - souvent aussi à partir d'un récit, d'un témoignage, d'une reconnaissance : « Il faut que quelqu'un d'autre légitime notre prétention d'être vivant » écrit Dany Laferrière dans Tout bouge autour de moi (2011), livre écrit après le séisme d'Haïti. Pour de nombreux réfugiés climatiques et/ou politiques, cette question se pose à partir des pays anglo-saxons où ils ont trouvé refuge, d'où cet appel à communications tourné notamment vers les anglicistes, mais non exclusivement : car c'est la perspective comparatiste qui nous intéressera le temps de ce colloque.

On ne compte plus dans les pays anglo-saxons les publications dont le titre contient le mot « rebuilding », qu'il s'agisse de la reconstruction d'une ville ravagée par un ouragan comme la Nouvelle Orléans, la rénovation des quartiers pauvres de New York, de villes entières comme Detroit, Sheffield ou Belfast, le rassemblement d'une vie après une séparation ou un décès, le remodelage de l'identité après un traumatisme... Au bout d'un siècle de destructions et de déconstructions, l'heure semble être venue à la reconstruction et non à celle du renouveau, comme si la croyance en un changement radical avait fait long feu. C'est donc avec modestie et une certaine prudence que la question de la reconstruction se pose à ceux qui ont la charge de réparer le désastre (si tant est que cela soit possible), de surmonter le temps de la sidération pour envisager une suite, un après qui ne soit pas seulement un champ de ruines. Reconstruire suppose-t-il l'oubli, la négation du passé ? Ou au contraire un refaçonnage à l'identique ? En reconstruisant ou se reconstruisant, ne risque-t-on pas d'escamoter l'expérience du trauma ? La reconstruction, à l'image de la paix, est à la fois une réalité et un concept ténus, à mi-chemin entre la survie et l'utopie, la vérité et la falsification. On pourra s'interroger sur les politiques (ou l'absence de politique) de reconstruction mises en œuvres par les gouvernements ou à plus petite échelle par les communautés et les individus, voire en mesurer, peut-être, les effets. Des catastrophes sanitaires marquantes comme la Grande peste (1665) ou le Grand incendie de Londres (1666), ainsi que la Grande Famine irlandaise (1845-9) pourront en fournir l'occasion. De même, les changements de régime et de société à l'issue de révolutions, comme la Restauration anglaise (1660-1688), ou de guerres, à l'image de la période dite de Reconstruction aux E.U. (1865-1877), s'offrent à l'étude. Le deuxième après-guerre au XXe siècle pourra également être envisagé, que ce soit du point de vue des littératures testimoniales ou des politiques de relèvement économique, social ou architectural. Cette période presque entièrement dédiée à la reconstruction et au recouvrement du trauma, ne cesse en effet de faire retour aujourd'hui au titre de modèle ou de repoussoir. On s'intéressera aux politiques mémorielles, aux archives, tendues entre la reconstitution du passé et la promesse d'un renouveau. Nous souhaitons étudier la capacité de nos sociétés à trouver des formes de représentation, de symbolisation, mais aussi de médiation politique et sociale permettant d'abord de survivre à l'inouï, peut-être de commencer à en faire sens. Nous souhaitons aussi évaluer les effets des diverses stratégies choisies pour répondre à l'innommable - peut-on identifier des formes possibles de dépassement, qui permettraient de s'orienter vers un « après-coup » ?

Deuxième volet d'une série de conférences consacrées à la terreur et ses après-coups, ces journées de colloque s'organiseront autour de quatre ateliers thématiques, ouverts à diverses approches (historiographique, littéraire, artistique, cinématographique, télévisuelle, etc.).

-atelier « Reconstruire la ville » : Katrina, les villes de l'après-guerre, Londres et ses multiples reconstructions au fil des siècles, la réhabilitation des friches industrielles, des quartiers déshérités...

-atelier « La part du témoignage » : écritures testimoniales, lieux de mémoire, thérapies, etc.

-atelier « Les politiques de la reconstruction » : Irak, Afghanistan, politiques d'après-guerre, réinsertion des anciens combattants, guerre contre la terreur, politiques anti-crise, etc.

-atelier : « La réponse de l'art » : l'art moderne et contemporain entre destruction et reconstruction, le recyclage artistique, le corps reconstruit dans les fictions posthumaines ou les comics, etc. Sur le plan critique, on pourra se demander par exemple ce que les nouvelles approches théoriques (new historicism, cultural studies, trauma studies, etc.) dans les études littéraires cherchent à reconstruire sur les ruines supposées de la déconstruction.

Merci d'adresser vos propositions de communication, en français ou en anglais, d'une longueur n'excédant pas 300 mots, avant le 1er juin 2012 aux membres du comité d'organisation : Stéphanie Ravez (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.) ou Yves Davo (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.).

 

Call for Papers 

International conference "After Terror : 2. Rebuilding".

 

CLIMAS - University of Bordeaux 3, November 8-9-10, 2012

''There is no future for the disaster,'' Maurice Blanchot wrote at the beginning of The Writing of the Disaster in 1980. And yet, ever since this publication, the question of ''what comes after'' is continually raised in the wake of natural, technological, individual and collective catastrophes that have shaken the planet, from Chernobyl to Fukushima, through Darfur and Haiti to Lhassa and Sarajevo. Each earthquake, each famine, kidnapping or massacre interrogates politicians, therapists, writers and artists : where and how are the means for rebuilding to be found?

The question of reconstruction is one that is always raised by survivors among the ruins where they have to start living again, sometimes in a host country where they are looking for ways to recover, often through narration, testimony, or just mere recognition. ''Someone else is needed to legitimate our pretention to still be alive,'' says Dany Laferrière in Everything is Moving Around Me (2010), a memoir written in the aftermath of the earthquake in Haiti. Many climatic and/or political refugees are confronted with this issue especially in anglo-saxon countries where they seek refuge. This is why our call for papers is specifically addressed to English and American studies specialists, but not exclusively, as we are also looking for comparative approaches.

There have been countless books recently published in English whose title contains the term "rebuilding", whether they deal with the rebuilding of a city devastated by a hurricane like New Orleans, or the renovation of poor neighbourhoods in New York, of entire cities like Detroit, Sheffield or Belfast, not to mention picking up the pieces of a broken life after a separation or the loss of a loved one, reshaping one's identity after a traumatic event... After a century of destructions and deconstructions, the time has now come for reconstruction instead of renewal, as if it were no longer possible to believe in radical change. It is therefore with extreme modesty and caution that the issue of reconstruction is tackled by people who are responsible for repairing (if possible) the damage, for overcoming the time of "sideration" in order to consider an aftermath that is not simply a heap of ruins. Does rebuilding necessarily imply oblivion? the negation of the past? Or, on the contrary, a remaking of things as they were? In reconstructing something, including the self, doesn't the experience of trauma risk being evaded? Like peace, reconstruction is fragile both as a concept and as reality; halfway between survival and utopia, truth and falsehood. We will examine reconstruction policies (or lack of them) implemented by governments, or on a smaller scale by communities and individuals, and possibly measure their efficacy in the wake of major health disasters like the Great Plague (1665), the Great Fire of London (1666), or the Great famine (1845-9). Likewise, government or society changes after revolutions like the English Restoration (1660-1688) or wars, as during the Reconstruction era in the US (1865-1877) may be studied. The second post-war period in the 20th century may also be envisaged, through the prism of testimonial literature or economic, social or urban recovery policies. Indeed, those years almost entirely dedicated to reconstructing and overcoming trauma keep returning today as a model or a foil. We will investigate memory policies, archives, torn between the revival of the past and the promise of a renewal. We would like to study the capacity of our societies to find forms of representation, of symbolization but also of socio-political mediations that allow us to outlive the unthinkable and maybe start to make sense of it. We would also welcome any assessment of the various strategies chosen to cope with disaster: is it possible, for instance, to identify possible forms of transcending disaster, which would lead to a real ''afterwardsness''?

This conference will be the second in a series of two events looking into the aftermath of terror - ''after terror''. The three-day symposium will be divided into four thematic seminars, open to various disciplines (history, literature, arts, cinema, television, comics, etc.)

-Seminar 1 ''Rebuilding the City'': Katrina, post-war cities, London and its successive reconstructions, the rehabilitation of industrial wastelands, of deprived areas...

-Seminar 2 ''The Role of Testimony'': testimonial writing, memory places, therapeutic attempts...

-Seminar 3 ''The Recovery Policies'': Irak, Afghanistan, Vietnam, post-war regulations, rehabilitation of war veterans, war against terror, anticrisis policies...

-Seminar 4 ''The Response of Art'': the place of destruction and reconstruction in modern and contemporary arts, recycling art, the body reconstructed in posthuman fiction and comics, etc. On a critical level, we may also reflect on the role played by new theoretical perspectives (new historicism, cultural studies, trauma studies, etc) in literary studies in the aftermath of deconstruction.

 

Proposals for papers (maximum 300 words) should be sent before June 1, 2012, to the organizing committee : Stéphanie Ravez (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.) or Yves Davo (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.).

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