Cormac McCarthy’s Blood Meridian: The Desert (of the) Real and the Writing of the “Hallucinatory Void” - José Liste Noya

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Résumés

Français :

Western métaphysique violent, aux allures de fable, mais néanmoins scrupuleux vis-à-vis de l’histoire et qui met en déroute toutes ces étiquettes génériques par son style excessif, Blood Meridian, le roman peut-être le plus célèbre de Cormac McCarthy, fait la part belle aux déserts du sud-ouest américain et du nord du Mexique. En effet, ces territoires qui, au milieu du XIXe siècle, furent le théâtre de conflits liés à l’expansion impérialiste, sont présentés de manière à la fois descriptive, allégorique, naturaliste et historique. Appréhendé tel un espace, et non pas simplement comme le décor inerte dans lequel McCarthy déconstruit la violence de la frontière, le désert fonctionne simultanément comme un lieu vide qui nourrit un fantasme politique et comme le vide qui menace d’anéantir ce fantasme. Mais alors comment représenter l’espace prétendument vide du désert ? Écrivain de romans qui remettent en cause de manière cinglante les mythes structurant de l’Amérique, et de fables grotesques et comiques qui sont empreintes de désespoir existentialiste et naturaliste, McCarthy a concédé que, malgré les prouesses littéraires de ses (re)créations fictives, « les livres sont faits de livres ». Sans nier la dimension éthique et ontologique évidente de son œuvre, le véritable désert de Blood Meridian est aussi, inévitablement, un désert textuel, c’est-à-dire, non seulement un texte sur le désert mais également un texte qui est un désert. À ce titre, le roman tisse inévitablement par son intertexte, des « inversions sans fin » pour donner corps à sa propre vision du désert du réel, pour reprendre un slogan baudrillardien. En effet, cette vision presque postmoderne de la nature simulée de la réalité est l’une des visions proposées par le roman, notamment par le biais de sa figure démiurgique, le Juge Holden. Mais cette atteinte un peu facile à l’endroit des descriptions réalistes assez impressionnantes du roman est contrée par le désespoir naturaliste sombre du roman qui, lui, nous renvoie au vrai désert et aux exactions humaines qui y sont perpétrées. En ce sens, l’« absolu du désert » de McCarthy ne nous dispense pas de la nécessité de revenir au réel que le texte suggère, qu’il s’agisse du réel entendu comme contexte historique ou de l’Autre bien réel que l’histoire pourrait chercher à congédier. En même temps, ce texte sur le désert n’exige aucune désertion du texte pour réaffirmer le « désert réel ». Il nous oblige plutôt à être attentif à cette « étrange sérénité » du réel que nos médiations textuelles, historiques et figuratives, ravagent et respectent tout à la fois. Dans ce roman, le désert devient cet étrange espace intertextuel mais aussi presque trans-textuel où les traces textuelles se rencontrent et les textes rencontrent d’autres textes, et aussi, où les textes vident le monde et le remplissent, par des moyens littéraires et politiques ambivalents, tandis qu’ils tentent d’en rendre compte.

Anglais :

A violent, fable-like, yet historically conscientious metaphysical Western that unsettles such generic labels through its stylistic and textual excess, perhaps McCarthy’s most critically renowned novel, explores the desert spaces of the American Southwest and northern Mexico, site of imperialist expansion and warfare in the mid-nineteenth century, in ways both descriptive, allegorical, naturalistic and historical. Not just an inert setting for his debunking depiction of the frontier violence that creates the American space, the desert as space functions as both empty site of political fantasy and as the void that threatens to swallow that fantasy whole. But how does one represent in these terms the supposedly empty space of the desert? McCarthy has admitted, as a writer of savagely demythologizing novels and grotesquely comic fables of existentialist and naturalist despair, that despite the literary prowess of his fictional (re)creations, alas, “books are made out of books.” Without denying the clearly sought ethical and ontological impact his work makes, the real desert of a novel such as Blood Meridian is also necessarily a textual desert, a text not only about the desert but a text which is a desert. As such, it unavoidably but also quite intentionally weaves intertextual “inversions without end” (121) in order to body forth its own vision of, to borrow a Baudrillardian slogan, “the desert of the real.” Indeed, such a near-postmodern vision of reality’s simulacral nature is one of the novel’s proffered visions, notably in the figure of its demiurgic arch-villain, the Judge, a legendary figure who turns out to be based on historical precedent. But this perhaps facile undercutting of the novel’s quite amazing descriptive realism is countered by the novel’s own gloomy naturalist despair that returns us to the real desert and its human exactions. In this light, McCarthy’s “desert absolute” does not absolve us of the need to return to the real the text intimates, whether the real of contextualized history or the Other real that very history might banish. At the same time, this text of the desert requires no desertion of the text in order to reaffirm the “real desert.” Rather, it forces us to pay attention to the “strange equanimity” (301) of the real that our textual mediations, historical and representational, ambivalently ravage and respect. The desert in his novel becomes this strange intertextual but also almost trans-textual site in which textual traces meet, texts meet texts, but where texts also empty the world and fill it, in politically and literarily ambivalent ways, as they reach out for that very world.

Auteur

Français :

José Liste-Noya est professeur au département de lettres de l’université de la Corogne où il enseigne la littérature américaine. Il est spécialiste du roman américain et s’intéresse tout particulièrement au postmodernisme, à la fiction spéculative et à la théorie littéraire. Ses travaux qui portent sur différents auteurs ont été publiés dans des revues scientifiques nationales et internationales comme Contemporary Literature, Studies in the Novel, Western American Literature, Atlantic Studies, Journal of Narrative Technique et JTAS (Journal of Transnational American Studies). Il a co-dirigé deux ouvrages respectivement intitulés Ethics and Ethnicity in the Literatures of the United States (Université de Valence, 2006) et American Secrets: The Politics and Poetics of Secrecy in American Culture (Rowman & Littlefield, 2011). Il est membre de l’équipe de recherche CLEU (Cultures et Littératures des États-Unis) de l’université de la Corogne et sa recherche s’inscrit au sein d’un des projets actuels de l’équipe, centré sur littérature et mondialisation.

Anglais :

José Liste-Noya teaches American Literature at the University of Corunna in northwestern Spain where he is a tenured professor in the Department of Languages and Literatures. He specializes in contemporary American fiction, with specific interests in postmodernism, speculative fiction and literary theory. He has published on diverse authors in his field in national and international journals such as Contemporary Literature, Studies in the Novel, Western American Literature, Atlantic Studies, Journal of Narrative Technique and JTAS (Journal of Transnational American Studies). He has also co-edited Ethics and Ethnicity in the Literatures of the United States (University of Valencia, 2006) and American Secrets: The Politics and Poetics of Secrecy in American Culture (Rowman & Littlefield, 2011). Currently he is a member of the CLEU (Cultures and Literatures of the United States) research group at the University of Corunna and is part of their current project on literature and globalization.

Entrées d’index

Mots-clés : Cormac McCarthy – désert – allégorie – rhétorique – sens

Keywords: Cormac McCarthy – desert – allegory – rhetoric – meaning

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