Résumés
Français
Les essais autobiographiques de Nancy Mairs offrent un exemple significatif de la manière dont la vulnérabilité influence l’écriture de soi et en redéfinit les règles génériques. Le sentiment de discontinuité éprouvé par l’auteur, atteint d’une sclérose en plaques qui ne cesse de transformer son corps de manière imprévisible, trouve un écho dans son rejet des formes closes au profit de celle de l’essai. S’appuyant sur son expérience personnelle, elle interroge dans ses textes la division entre esprit et corps et les autres formes de hiérarchie qui structurent la pensée occidentale. Nancy Mairs adopte également une posture de témoin ; la position à la fois vulnérable et marginale qui est la sienne devient un point d’observation depuis lequel elle dénonce l’idéologie patriarcale et les préjugés à l’égard du handicap qui structurent en profondeur notre utilisation du langage. Ses essais prennent ainsi fréquemment la forme d’analyses lexicales dans lesquelles elle entreprend de mettre en lumière les couches de sens qui se sont solidifiées autour de mots banals. Le rejet du « je » autonome de l’autobiographie qui traverse toute son œuvre est au fondement de ce que l’on pourrait appeler une poétique relationnelle. Incluant les voix de ceux qui l’entourent ainsi que la figure du lecteur, ses essais mettent en avant le tissage complexe de subjectivités qui sous-tend toute existence et la réciprocité implicite présente au sein de toute relation de soin.
Anglais
Nancy Mairs’s autobiographical essays offer an interesting insight into the way vulnerability can shape life writing and redefine it as a genre. The sense of discontinuity experienced by the author, whose multiple sclerosis keeps altering her body in unpredictable ways, is mirrored by her rejection of totalizing forms. Far from the unified, definitive portrait often offered by autobiographers, her essays turn provisionality into a defining feature; drawing from the author’s daily experiences, they question the body / mind dichotomy and other hierarchies that structure western thought, and advocate a more inclusive form of knowledge. In her essays, Nancy Mairs positions herself as a witness. Her vulnerable and marginal position as a disabled woman becomes a vantage point from which she exposes the patriarchal beliefs shaping our society and the ableist assumptions deeply embedded in our use of language. Her essays therefore often take the form of lexical analyses in which she proceeds to unpack the complex layers of meaning solidified around common words. Nancy Mairs’s rejection of the autonomous “I” of autobiography is at the heart of what one might call a relational poetics. Including the voices of her family and engaging repeatedly with the reader, her essays bring to the fore the interwoven dimension of all lives and the often unperceived reciprocity underlying the relationship between patient and caregiver.
DOI: http://dx.doi.org/10.21412/leaves_0301
Entrées d’index
Mots clés : Nancy Mairs, maladie, handicap, vulnérabilité, autobiographie, essai.
Key words: Nancy Mairs, Disability studies, illness, vulnerability, autobiography, essay
Auteur
Français
Laure de Nervaux-Gavoty est Maître de conférences en anglais à l’Université Paris-Est Créteil. Elle a publié des articles sur la poésie américaine (Sylvia Plath, Mina Loy), l’autobiographie (Alice James, Vladimir Nabokov, Lucy Grealy) et les relations entre la littérature et les arts visuels. Ses recherches portent actuellement sur la représentation du corps et de la maladie dans l’autobiographie américaine.
Anglais
Laure de Nervaux-Gavoty is senior lecturer in English at Paris-Est Créteil University. She has written articles on women’s poetry (Mina Loy, Sylvia Plath), autobiography (Alice James, Vladimir Nabokov, Lucy Grealy), and the relationship between literature and the visual arts. She is currently working on the representation of illness and the body in American autobiography.